Sourde oreille…



Tu n’es pas venue sans crier gare, omniprésente tu étais dès le commencement
Diffuse et silencieuse, tu t’es confortablement nichée en moi sans consentement
Pas de puce à l’oreille, l’inconfort et la douleur se voulaient naturels, légitimes,
Chacun ressentait semblable résonance, sans possible doute, tous unanimes

Le temps s’écoulait, peu à peu les notes se faisaient de plus en plus dissonantes
Pourquoi, cette sensation soudain… Quelle mutation la rendait si éprouvante
Cette conjecture commençait à apparaitre telle une lourde escorte, fatigante
Mais votre silence, était signe que je me leurrais, suspicion incongrue et latente

Je finissais par observer les distances, les écarts entre nos énergies respectives
Hypocondrie naissante ? Que pouvais-je donc imaginer comme autre alternative?
Décennie après décennie, je voyais mes actions rétrécir, mais pas chez autrui
Alors j’ai su que quelque chose de différent se jouait de moi, mais je n’ai pas compris

Il a fallu que je pousse mon usine, que j’aille enfreindre les limites que j’ignorais
Pour arriver à un stop sans appel et définitif, une impossibilité éprouvée
Là seulement, ma pensée ou peut-être mon corps, ou les deux de concert
Ont crié une alarme sans appel, sans que je ne puisse en percevoir l’envers

J’en ai entendu des discours, et j’en ai couru des kilomètres pour trouver
Après plus de quatre décennies enfin, je découvrais que rien n’aurait dû exister
Tout ce qui avait été ne s’inscrivait pas dans la normalité du corps et des sens
Que les sens et le corps ne sont pas composés d’une perpétuelle douleur,
Que la douleur serait tenace et mènerait à l’épuisement
Que le constant épuisement avait une conséquence, des maux
Que ces maux avaient une unique source
Que cette source n’était pas non plus le fruit de mon imagination
J’ai appris que je devrai encore apprendre,
Apprendre à apprivoiser l’ensemble qui composait ce mal,
Et que ce mal, rien aujourd’hui ne pouvait avoir raison de lui.
J’ai appris que d’autres traversaient le même décor,
Les mêmes coups du sort
J’ai vu des êtres n’être plus que douleur
J’ai vu des êtres réduits à l’impuissance
J’ai vu des êtres ne plus savoir que faire
Si ce n’est taire ce qui prenait trop de place

Mais j’ai choisi de faire le tri.
De ne pas tout prendre.
Mon énergie, je l’emploie à conserver ce qu’il me reste
Ce qui est perdu est perdu, je l’ai vu
Mon corps, ressemble à cette boule de mousse où l’on plante des épingles
Douleurs en perpétuel renouvellement, en perpétuelle mutation
Certaines disparaissent un temps, telles des éclipses temporaires,
Alors que d’autres naissent, grandissent et prolifèrent
Douleurs en cohorte,  imprévisibilité en escorte,
La résistance se doit d’être hors norme.

Qui a le choix ?
Chacun a le choix de lutter, ou d’abandonner
Chacun pose les limites individuelles
Et personne ne peut les blâmer
Mal invisible et insidieux tu t’es emparé de moi
Le dernier mot tu n’auras pas
Je l’ai décidé ainsi
Car c’est moi et moi seule
Qui choisirai quand tout cela doit finir.
23/03/2011

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