Le chiendent de fil en aiguille



Les herbes folles, les adventices, et pour d'autres "les mauvaises herbes" sont-elles si mauvaises ?
A l'échelle humaine, le plus souvent, ce qui n'est pas souhaité est repoussé, fréquemment éradiqué, considéré comme une erreur.
En terme d'erreur de la nature, l'humain n'a pas son pareil mais c'est une nuance que seule une minorité de terrestres admet...

Mais revenons au chiendent.

Même si je ne considère pas le chiendent comme un "ennemi à combattre", j'avoue aisément qu'au sein du jardin, et plus particulièrement dans mes zones de culture, ce dernier est taquin ! Oui, taquin ! Coquin même !

Il grignote l'espace du raz du sol, ou juste en-dessous, ouvre ses grands bras, enlace en conquérant mais toujours avec grande discrétion !

Il est fort le chiendent !

Alors comme nombre de jardiniers, il me faut régulièrement passer mon croc à trois dents, mettre à nu les longues branches qui serpentent et traversent parfois une zone de part en part.
C'est un travail chronophage, pénible (voire usant) que celui qui consiste à endiguer son expansion sur les zones de production.

Depuis plusieurs mois, j'ai entrepris d'ôter tout le chiendent d'un espace conséquent entre deux zones. Cela m'a pris un certain temps car ses ramifications étaient nombreuses et le sol était très compacté par mes passages répétés.
Si je l'ai entrepris, c'est que j'estimais passer trop de temps à intervenir pour que le chiendent n'avance pas sur les zones de culture. Finalement, cet espace sera lui-même une nouvelle zone de culture, séparée de part et d'autre par des passe-pieds.

Au fur et à mesure de ce labeur, j'empilais les brouettes de chiendent et les remisais le long de la clôture du jardin. Et durant de longues semaines, je l'ai oublié là.

Et voilà que l'automne s'est installé ; les jeunes et frêles semis sortaient de terre... Mais un souci annuel est venu contrarier mes projets. Les merles.
Je les avais totalement oubliés les merles aussi ! Pourtant, à chaque automne, c'est le même scénario : le gang des merles rôde !

Ils fouillent, retournent les semis, écartent le paillage, piquent et retournent les plaques de mousse que j'essaie de faire pousser entre les fraisiers, bref ! ils mettent tout sans dessus dessous (NB : ces coquins farceurs aiment aussi peu que moi l'oxalis qui se propage et sont mes petites mains pour les limiter)
Afin de temporiser un peu leur ardeur et laisser une chance à mes cultures de prospérer un peu plus, j'innove et j'essaie de trouver des astuces avec ce que j'ai sous la main ou facilement.
Entre autres astuces, j'ai découvert qu'en entourant de branches de chiendent (quasiment composté) les pieds de mes arbres où sont semées des fèves, les merles semblent perplexes et pas très disposés à devoir traverser ce manteau hirsute ou à devoir le défaire...

Et puis début décembre j'ai décidé d'installer une longue haie...
C'est alors que j'ai repensé à ce gros tas de chiendent empilé le long de la clôture...
J'étais un peu à cours de paillage et les feuilles d'automne que j'avais sous la main n'étaient que du chêne (ce qui n'est pas très recommandé car très long à se composter et renfermant beaucoup de tanin)
Les jeunes arbustes semblaient vigoureux mais vulnérables également face à l'hiver qui ne manquerait pas d'arriver...

Alors j'ai tenté quelque chose...
Pour chaque arbuste, j'ai fait un trou carré (délimité par les crocs de la grelinette à 6 dents)


Une fois planté et le trou comblé, avec le restant de terre, j'ai formé une cuvette conséquente.


Dans le creux de la cuvette, j'ai déposé le peu de paille qu'il me restait ou que je récupérais d'autres endroits du jardin. Puis j'ai mélangé une paille plus épaisse avec quelques feuilles de chêne et j'ai recouvert les abords de la cuvette. Jusqu'ici c'est très banal...


Ensuite, je suis allée sur mon tas de chiendent pour y prélever les branches les plus ramifiées, en début de compostage si possible, et je les ai aussi disposées sur les contours de la cuvette. Et enfin j'ai pris des morceaux de chiendent plus compacts pour "colmater" le bas extérieur de la cuvette.













En faisant ainsi j'espérais à la fois protéger les jeunes plants du froid à venir mais également des merles qui pourraient être tentés de venir fouiller les lieux.

J'avais une grosse réserve de chiendent remisé, mais après avoir multiplié ces "manteaux hivernaux", il ne m'en reste qu'une petite couche que je laisse aux vers composteurs de surface qui, eux aussi, on su tirer parti de ce tas d'herbes folles.

En attendant, ce chiendent m'a permis de protéger les végétaux, d'alimenter la biodiversité et, cerise sur le gâteau, de limiter les ardeurs du gang des merles.

Le chiendent est coquin, soit ! Mais le chiendent est mon copain !

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